Echos 2008

Ici sont reprises des réactions - passées ou non par “contactez-moi” - à ce site : critiques, divergences, propositions ou autres contributions. Dans certains cas, je peux m'autoriser une brève réponse.
Peuvent aussi trouver ici leur place des propos, des prises de position, des déclarations venus d'ailleurs - d'autres temps, d'autres lieux, d'autres horizons - qui me paraissent de nature à nourrir l'information ou la réflexion sur des problèmes importants, des réponses, des actions en cours ou à mener...
Une rubrique qui, elle aussi, se renouvelle au fil des semaines.


  • DECEMBRE 2008 :
  • 50 milliards : qui a gagné, qui a perdu ?, 50 milliards de $
  • NOVEMBRE 2008 :
  • Un mort qui dérange, Obama s'engage sur le climat, Rocard a dit
  • OCTOBRE 2008:
  • À quand la prochaine crise ?, Chère décontamination
  • SEPTEMBRE 2008 :
  • Le CERN victime d'une fuite, Le CERN amorce son nano-Big Bang
  • AOÛT 2008 :
  • Afghanistan : Sarkozy après Bush, Morts en Afghanistan, Le prince Charles et les OGM, Un atlas européocentré, Soljenitsyne
  • JUILLET 2008 :
  • Entre USA et Chine, Pauvreté et opulence
  • JUIN 2008 :
  • Bush sème la discorde
  • MAI 2008 :
  • Cent mille..., Popularités en chute
  • AVRIL 2008 :
  • Sources du mal, Le trou noir du CERN
  • MARS 2008 :
  • Retour de Venise
  • FÉVRIER 2008 :
  • "Casse-toi",  Kokopelli
  • JANVIER 2008 : Année la plus chaude, Spatial touristique, Autour de l'Iran, Menaces sur la biodiversité, Cher Tony Blair, Une suggestion
  • DÉCEMBRE 2007 :
  • Sur la misère

Avril 2012

Irresponsabilité

  Pour la première fois, l’Humanité est confrontée à des problèmes dont elle est la source et qui la concernent, elle et l’ensemble de la planète : des problèmes, des menaces, des dévastations, face auxquels elle se révèle désarmée, incapable d'assumer ses responsabilités, irresponsable.
    Ce n’est pas faux, mais c’est inexact. Il faut préciser.

    Pour la première fois, les sociétés humaines sont confrontée à des problèmes, des menaces, des dévastations dont les activités, les productions et les consommations des pays les plus riches sont les principales sources - et qui concernent l’ensemble de la planète et de l’Humanité. Or ni les organisations onusiennes (dominées par quelques grands pays et sous l’influence des grands groupes mondiaux) ni les grandes puissances ne parviennent à mettre en œuvre les actions nécessaires.
    Dès lors, l’Humanité n'a pas su construire la capacité d'assumer ses responsabilités qu'implique le niveau et la puissance des outils techniques qu'elle a constitués et qu’elle met en œuvre.

    Soyons plus précis : soutenus par leurs États, les grands groupes mondiaux bénéficient d’une impunité quasi-totale pour les pollutions et les dévastations qu’ils ont causées et qu’ils continuent de causer ; de là vient l’irresponsabilité de l’Humanité face aux maux qui l’accablent, elle et la planète.
    Là réside le cœur du drame de ce début de XXI° siècle.


Décembre 2008

50 milliards : qui a gagné, qui a perdu ?

 Après la mise en cause de  M. Madoff (voir écho d’hier), s’allonge la liste des floués : de riches particuliers, mais aussi des banques, des fondations, d’autres fonds, Cette faillite est un peu présentée comme la catastrophe du Titanic. Et en effet, 50 milliards ça n’est pas rien.
 Mais tous n’ont pas perdu : avec un rendement de 10 %, on double son capital en 6 ou 7 ans. Or le système Madoff fonctionne depuis une trentaine d’années ; beaucoup, parmi les déposants du début ont pu doubler, tripler, “x-tupler” leurs mises. D’où la renommée, le bouche à oreille dans les sphères de l’argent, la boule-de-neige des dépôts, dont chacun fructifiait à loisir..., sur les relevés. Beaucoup sans doute ont gagné en retirant à temps - par nécessité, prudence ou suspicion - la totalité ou une part suffisante de leurs placements.
 “Les derniers venus ont tout perdu”, écrivè-je hier : c’est statistiquement très probable, mais très simplificateur. Parmi les détenteurs en nom des 50 milliards évanouis, ont tout perdu ceux qui ont laissé fructifier leur avoir, sans rien en sauvegarder, jusqu’au jour fatal : parmi eux, la plupart des souscripteurs récents, mais aussi des apporteurs de capitaux plus ou moins anciens qui se félicitaient de voir grossir leur pelote ; d’autres ont à la fois gagné (par ce qu’ils ont retiré) et perdu (pour ce qu’ils ont laissé jusqu’au naufrage). Et puis, beaucoup, depuis 30 ans ont gagné : gageons qu’ils ne s’en vanteront pas et qu’on n’en aura jamais la liste, ni le montant de leurs gains.
 Des gains qui, sauf détournements, doivent se chiffrer en dizaines de milliards.

      Lundi 15 décembre 2008

50 milliards de $

 Ancien président du Nasdaq, M. Madoff était une figure reconnue et estimée de Wall Street. Il fallait une recommandation pour avoir une chance de lui confier des fonds à faire fructifier. Lui-même assurait de hauts rendements et prônait des placements éthiques. Avant son arrestation, il a réalisé quelques fonds personnels pour mettre à l’abri du besoin sa famille et quelques proches. Il laisse un trou de 50 milliards de $ après une carambouille élémentaire déjà pratiquée par d’innombrables escrocs de tous poils et de tous acabits : quand les vents ont tourné, il s’est mis à payer les intérêts et les retraits grâce aux placements encaissés. Grandes familles, banques et fondations, beaucoup ont perdu. Et, comme dans une comptine, les derniers venus ont tout perdu.

 Plus grande est la confiance, mieux ça marche...

     Dimanche 14 décembre 2008


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Novembre 2008

Un mort qui dérange

Lendemain de la fête de “Thanksgiving”, hier était aux États-Unis le traditionnel “Black Friday” : jour de soldes qui ouvre la période des achats pour les fêtes de fin d’année. Dans un magasin Wal-Mart de Long Island, la journée s’est ouverte sur une mort : celle d’un employé engagé pour cette journée de forte affluence. Alléchée par des annonces de promotions exceptionnelles, une petite foule s’était rassemblée dans la nuit devant les portes. À l’ouverture, ce fut la ruée ; l’employé fut entraîné, renversé, piétiné ; des collègues qui tentaient de le secourir furent blessés ; la victime mourut à son arrivée à l’hôpital. L’annonce de la fermeture du magasin pour la matinée fut accueillie par des huées et des protestations : “Et nous, alors, qui avons attendu des heures, dans le nuit et le froid ?”
 Que dire d’une société où, pour des soldes, on peut perdre raison, contrôle et humanité ?


    Samedi 29 novembre  2008

 

Obama s'engage sur le climat

Barack Obama promet que "les Etats-Unis s'engageront énergiquement dans les négociations" sur le climat. Bravo ! Mais, après 8 ans de Bush - dont ont, sur cette question, largement profité les dirigeants chinois et indiens - ça va être difficile. Il y a 8 jours (v billet du 13), Nobuo Tanaka, directeur de l'AIE soulignait la nécessité d'« une révolution énergétique globale promouvant l'efficacité énergétique et accroissant le recours aux énergies peu émettrices de carbone ». Très bien ! Sauf qu'il estimait que les tendances actuelles conduisent à un relèvement de 6°C de la température terrestre et qu'il sera très difficile de le limiter à 2°C. Là encore le passif des deux mandats de Bush va être lourd.

    Mercredi 19 novembre 2008

 

Rocard a dit

  Remarquable interview de Michel Rocard dans le Monde. il balance allègrement quelques vérités dérangeantes : “planquer des créances pourries parmi d'autres, grâce à la titrisation, comme l'ont fait les banques, c'est du vol (...). Des professeurs de maths enseignent à leurs étudiants comment faire des coups boursiers. Ce qu'ils font relève, sans qu'ils le sachent, du crime contre l'humanité (...). La montée en puissance des produits dérivés résulte d'une désorganisation de l'économie réelle, qui elle-même découle de la décision prise en 1971 par Richard Nixon et, déjà, Dick Cheney de décrocher le dollar de l'or” (ce qui a conduit aux changes flexibles). “Depuis une vingtaine d'années, les pays développés s'échinent, sans y parvenir, à retrouver la moitié de la croissance qu'ils ont connue durant les Trente Glorieuses, et un quart de leurs habitants sont fragilisés, parce qu'ils sont pauvres, chômeurs ou travailleurs précaires. Cette fragilisation est une gangrène (...). On ne s'en sortira pas sans un meilleur partage des revenus, un meilleur équilibre entre salaires et profits (...). La course au profit immédiat est destructrice. Elle menace l'appareil de production, précarise l'emploi et constitue un danger pour la démocratie”.
  Il préconise un autre système”(monétaire international) avec le dollar, l'euro, le yuan chinois, la roupie indienne, peut-être le yen, appelle à s'obliger à des économies d'énergie” et propose des mesures simples pour mieux réguler le système: limiter l'usage des produits dérivés, lutter contre les paradis fiscaux, revoir le fonctionnement des fonds de pension en les obligeant à avoir des comportements liés au long terme.


Rafraîchissant et roboratif.

    Samedi 1er novembre  2008

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Octobre 2008

 À quand la prochaine crise ?“

La chute périodique dans la démence n'est pas un trait merveilleusement séduisant du capitalisme. Son coût humain n'est pas négligeable, ses effets économiques et sociaux non plus (...). Quand viendra le prochain grand épisode spéculatif ? et sur quoi portera-t-il - l'immobilier, les titres, les objets d'art, les voitures de collection ? Eh bien, il n'y a pas de réponse. Personne n'en sait rien, et celui qui prétend savoir ne sait pas qu'il ne sait pas. Mais une chose est certaine : il y aura un autre épisode, et d'autres encore après lui”.
  Voilà ce qu'écrivait en 1990, un des meilleurs analystes du capitalisme américain, John Kenneth Galbraith, dans la conclusion de son livre A Short History of Financial Euphoria - conclusion que le Monde a eu la bonne idée de republier.

    Dimanche 19 octobre 2008

 

Chère décontamination


 Plus de mille milliards de dollars : c'est, sur la base d'une évaluation faite en 2004 par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), ce que coûterait le démantèlement des installations atomiques et nucléaires dispersées dans le monde.
    C'est un peu plus que l'enveloppe annoncée par le président Bush pour le sauvetage des grandes banques américaines en difficulté (billet du 20 IX). Mais pour les banques, il s'agit de crédits que le Trésor US peut espérer se voir rembourser. Alors que pour le chantier nucléaire, ce seront des dépenses à la charge principalement des contribuables de demain : des dépenses que les générations montantes et à venir auront à supporter - avec bien d'autres charges que nous leur laisseront.

Mercredi 1er octobre  2008


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Le CERN victime d'une fuite

Mis en fonctionnement il y a une dizaine de jours (v. écho du 10), le Grand collisionneur de hadrons (LHC) a très vite été arrêté pour un problème dans son système de refroidissement ; le voici à nouveau en panne à cause d'une importante fuite d'hélium survenue vendredi dans le tunnel : une fuite qui va nécessiter un arrêt d'au moins deux mois.

  Certains commencent à penser que le grand collisionneur de hadrons (LHC) a la scoumoune tandis que d'autres se demandent quel bon génie tente de protéger la Terre.

Dimanche 21 septembre  2008

 


Le CERN amorce son nano-BigBang

  C'est aujourd'hui que les chercheurs du Cern lancent  le processus qui doit permettre de reproduire des phénomènes du type de ceux qui se sont produits lors du Big Bang originel (v. écho du 1er avril). Dans leur  nouvel accélérateur de particules -  un tunnel de 27 km où est maintenue une température proche du zéro absolu - il s'agit d'obtenir des collisions entre des particules portées, grâce à des aimants, à une vitesse proche de celle de la lumière. Les scientifiques s'emploient à rassurer les inquiets : au pire, le grand collisionneur de hadrons (LHC) ne pourrait entraîner que de micro-trous noirs, sans danger pour le Terre et probablement aussi pour la Suisse.
   Là, ça commence à devenir troublant. Car, quand on ne  sait rien de l'anti-matière, de l'anti-énergie et des trous noirs comment peut-on être sûr que la Suisse sera protégée par son statut international ? Et si le big bang avait commencé par un nano-trou noir ? Si c'est le cas, et si l'expérimentation réussit, nul jamais ne saura.

Mercredi 10 septembre 2008


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Afganistan: Sarkozy après Buch

Ce matin, le président Sarkozy s'est recueilli devant les cercueils des soldats tués (v. Écho du 19 VIII) Il s'est aussi adressé aux troupes : “La meilleure façon d'être fidèles à vos camarades c'est de continuer le travail, c'est de relever la tête, c'est d'agir en professionnels (...). Je tenais à vous dire que le travail que vous faites ici, il est indispensable (...). Pourquoi on est ici ? Parce qu'ici se joue une partie de la liberté du monde. Ici se mène le combat contre le terrorisme (...). Je n'ai pas de doute, il faut être là (...). Je vous dis en conscience que si c'était à refaire, je le referais. Pas la patrouille et l'enchaînement des événements, mais le choix qui m'a amené à confirmer le choix de mes prédécesseurs d'envoyer l'armée française ici.

  Ainsi, il confirme. Il reprend le thème de la guerre au terrorisme : un slogan soufflé à l'oreille d'un Bush désemparé au lendemain de l'attaque du 11 septembre 2001; un slogan doublement décalé : d'abord parce que ce n'est pas par l'armée que l'on combat le terrorisme, mais par le renseignement, la police et l'éradication de ses causes; ensuite, parce qu'en 2008 on n'en est plus à pourchasser en Afghanistan les dirigeants historiques d'al-Qaida qui a largement essaimé dans le monde, mais à y combattre une rébellion nourrie par la présence de la coalition et l'échec du régime Karzaï.
  Ainsi, il n'a pas de doute. Il paraissait avoir renforcé la présence militaire française en Afghanistan pour faire briller son image aux yeux d'un Bush affaibli en fin de règne. Il semble maintenant prêt à nous engager dans une guerre impossible à gagner - comme l'armée soviétique en a fait la meurtrière expérience ; une guerre asymétrique, irrégulière, où les partisans ont tout leur temps et magnifient leurs morts en héros ou en martyrs, alors que les coalisés occidentaux en mesurent la charge année après année et voient dans les morts des vies brisées et des familles accablées.
  Mais qu'en pense réellement Sarkozy le malin, qui avait promis aux Français plus de pouvoir d'achat, la sécurité et la paix ?

   Mercredi 20 août 2008 

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Morts en Afghanistan

  Cette dernière minute du Monde.fr (avec AFP) tombe à 12hO1 : “Dix parachutistes français tués en Afghanistan. Dans la nuit de lundi à mardi, des militaires du 8e régiment de parachutistes d'infanterie de marine (RPIMa) basé à Castres (Tarn), ont été pris dans une embuscade à une soixantaine de kilomètres à l'est de Kaboul, selon des sources française et afghane. On dénombre également vingt et un soldats français blessés”.
  Dans le numéro du Monde paru hier à Paris, j'avais relevé ce matin ce titre : “L'armée française veut «modérer» les blogs des militaires - Le foisonnement de ces journaux de bord inquiète la hiérarchie”. L'article relevait que “si le ton est la plupart du temps glorificateur, certains soldats ne cachent pas leur ennui ou leur amertume”. En témoignaient ces deux citations : “Attendre que ça se passe, je commence à en avoir ras-le-cul ! Alors il est vrai que j'en profite pour faire du sport mais ça aussi ça commence à me courir sur le haricot” - et : “Combien d'entre nous ont été abandonnés par leurs proches lorsqu'ils ont su qu'ils avaient tué des gens de sang-froid en obéissant aux ordres ? Ce métier, c'est une prison cérébrale”

    Mardi 19 août 2008  

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Le prince Charles et les OGM

  Dans une interview publiée hier dans le Daily Telegraph, le prince Charles estime que le recours effréné aux OGM (organismes génétiquement modifiés) risque d'être à l'origine de la pire "catastrophe" environnementale qu'aura subie la planète. Il s'en prend au complexe techno-agro-industriel : "Dépendre de groupes gigantesques pour la production alimentaire plutôt que de petits fermiers ne peut déboucher que sur un désastre total". Il résume d'une phrase la démarche qu'il préconise : "Il ne s'agit pas de revenir en arrière mais de reconnaître que nous sommes du côté de la nature, pas contre elle".

   Certes, beaucoup - agronomes, agriculteurs et autres penseurs de notre monde - l'ont déjà dit. Mais, dans un temps où la presse corrode notre vision de l'univers en nous submergeant de futilités people, entendre un prince héritier poser des questions essentielles a quelque chose de rafraîchissant.

    Jeudi 14 août 2008 

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Un atlas européocentré

  Je feuillette l'Atlas du monde global (A. Colin/ Fayard, 2008) de Pascal Boniface et Hubert Védrine : un utile assemblage de cartes sur diverses interprétations du monde actuel, sur des réalités éco-socio-culturelles par régions et sur les visions du monde à partir de différents pays ou ensembles régionaux.

  Mais pourquoi diantre qualifier le monde de “global” ? Il est inutile de rappeler qu'il est sphérique et, si c'est pour sacrifier à l'anglomanie, on tombe dans la redondance.
 Il a plus grave. L'histoire - des premiers hommes à la Première Guerre mondiale - est présentée en deux temps :
- “Les premiers hommes peuplent la Terre” ;
- “L'apogée de l'Europe”.
 Bigre ! Le monde contemporain aurait été créé en deux jours. Premier jour, les humains essaiment sur les terres émergées. Second jour, les Européens étendent leur domination et se partagent le monde. Un raccourci nécessaire pour parler du monde d'aujourd'hui ? Mais à quel prix ! Car comment comprendre le monde d'aujourd'hui sans connaître l'émergence des techniques, des pensées, des religions et des civilisations ; la formation des royaumes, des empires et des États-Nations ; les migrations, les conflits et des dominations ; la circulation des marchandises, des idées et des valeurs ; bref, ce qui a fait l'héritage stratifié et composite que recèlent les groupes humains et leurs terres. Je pense notamment à l'irremplaçable
Atlas historique universel, réalisé sous la direction de Jacques Bertin et publié par Minerva (Genève) en 1997...
 Ouvrir l'historique par ces deux étapes crée un biais. Ce biais est renforcé par le fait que seuls les grands pays européens bénéficient d'une présentation cartographiée de leurs histoires. Et c'est finalement un
Atlas du monde vu d'Europe qu'on a entre les mains. Cette vision biaisée se retrouve, il est vrai, dans bien d'autres livres à prétention universelle actuellement publiés en Occident - par exemple sur l'histoire, la démocratie ou l'humanisme.

    Mercredi 6 août  2008 

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Soljenitsyne

 Mort d'Alexandre Soljenitsyne à presque 90 ans.

   Pour moi, il a été et restera un admirable écrivain, parmi les plus grands des XIXe et XXe siècles. Il a traversé les plus dures épreuves - déportation, enfermement, exil (intérieur et extérieur), terribles conditions de vie... - grâce à sa passion d'écrire et, plus profondément, à ses passions de la langue russe, de l'âme russe, de la richesse et de l'histoire de la Russie. Pris dans le système concentrationnaire, il en a triomphé par son obstination à le décrire et à le faire connaître. Il n'a cédé ni à l'oppression, ni à l'enjôlement du pouvoir, des honneurs ou de la gloire - qu'il n'a jamais écartés, tâchant de les utiliser au mieux -, ni à l'isolement et à l'usure du temps - qu'il a également cherché à utiliser au mieux. Un homme d'exception dans un monde où les puissants veillent à s'entourer de commis empressés et à promouvoir de serviles médiocrités.

    Lundi 4 août 2008 


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Entre USA et Chine

Dans Libération d'aujourd'hui, un portrait de Michel Lacoste, 65 ans, héritier de la marque au crocodile. Accroche l'œil une photo de l'industriel dans la posture insolite d'un saurien tentant de ramer tout en fixant l'objectif : pour faire jeune et décontracté  ? Puis, dans un papier sans relief, cette pique : “Entre l'Amérique de Bush et la Chine actuelle qu'est-ce qui est le plus terrifiant ?”

   Livré hors contexte, ce jugement invite à réfléchir. Finalement, face à un régime non encore débarrassé de sa gangue totalitaire et qui doit gérer les brutales transformations d'un empire plurimillénaire de plus d'un milliard d'humains, me paraît plus terrifiante une démocratie délabrée, dotée des plus grandes capacités productives et destructrices du monde qui, dirigée par une clique d'affairistes sectaires, a profité de l'attentat du 11 IX pour enfreindre des dispositions majeures de la Constitution américaine et du Droit international, a usé de justifications fallacieuses pour engager une désastreuse guerre aux fins obscures et a contribué à une nette détérioration des relations internationales, de l'économie, des finances et de l'environnement dans le monde.

    Mardi 29 juillet  2008 

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Pauvreté et opulence

  En lisant le Monde.  Il manque à l'Onu 3,4 milliards de dollars pour répondre aux pénuries de nourriture, aux effets des conflits et aux désastres environnementaux. Dans les pays les moins avancés l'économie croît, mais la pauvreté ne recule pas, alors que l'objectif onusien était qu'elle se réduise de 50 % de 1990 à 2015.  Pour la huitième année consécutive, les plages de la Côte d'Azur subissent un déferlement de méduses urticantes : pourrait expliquer ce phénomène la conjonction entre le déclin de leurs prédateurs (surpêche du thon et moindre reproduction des tortues de mer), la hausse d'un degré de la température des eaux et la dilution dans ces eaux de certaines substances médicamenteuses. Des populations humaines souffrent de la faim, des espèces animales disparaissent, des ressources vitales s'épuisent, des milliardaires s'octroient d'inconcevables fortunes...

 “Ça va !”, disait déjà en 1953 le Diable dans une chanson de Jacques Brel :
“Il y a toujours un peu partout
Des feux illuminant la Terre
Ça va
Les hommes s'amusent comme des fous
Au dangereux jeu de la guerre
Ça va...
“Rien ne se vend mais tout s'achète
L'honneur et même la sainteté
Ça va
Les États se muent en cachette
En anonymes sociétés
Ça va...”

  Ça va ?

    Jeudi 17 juillet 2008

Bush sème la discorde

Bush et le Congrès désavoués par la Cour suprême, titre le Monde.
En fait, c'est plus compliqué. D'abord c'est la troisième manche : deux fois déjà - en juin 2004 et juin 2006 - la Cour suprême avait désavoué le dispositif mis en place par l'administration Bush pour exclure les “ennemis combattants” de la protection du système judiciaire américain ; et deux fois - en octobre 2005 et octobre 2006 - le président Bush avait fait voter au Congrès des lois privant ces “ennemis combattants” du droit à l'habeas corpus
Cette fois-ci, il est vrai, la Cour va droit au but : “Les lois et la Constitution sont conçues pour survivre et rester en vigueur même en des circonstances extraordinaires” ; elle récuse l'idée que la protection de la Constitution américaine ne s'appliquerait pas à Guantanamo du fait que cette base est louée  à Cuba : “La Charte fondamentale de la nation ne peut pas être ainsi sous-traitée”.
Mais cette position a été adoptée avec seulement une voix de majorité et les quatre juges minoritaires - parmi lesquels le président de la Cour - la critiquent vivement ; ainsi le juge Scalia écrit : "Quelle compétence a la Cour pour mettre en cause le jugement du Congrès et du président ? Aucune”. De même, le sénateur Lindsey Graham, co-artisan avec le prochain candidat républicain John McCain de la loi de 2005, a estimé que "la Cour a donné à des juges civils le droit de prendre des décisions sur le plan militaire” tandis qu'un ancien conseiller du premier président Bush dénonçait "l'arrogance judiciaire". 

   Ainsi, en mettant en cause le droit de détenus étrangers à bénéficier de la protection qu'a mise en place la Constitution américaine, le second président Bush a contribué à instaurer une discorde probablement durable au sein des institutions, de la classe politique et de la société américaines. 

    Vendredi 13 juin 2008

Cent mille...

Il y a six jours, le passage du typhon Nargis s'accompagnait d'une vague de plusieurs mètres qui a ravagé des dizaines de milliers de km2 dans le sud de la Birmanie. Les estimations officielles du nombre des victimes sont passées de quelques centaines à quelques milliers, pour se fixer vers 23 000 - alors que des informateurs locaux et des humanitaires ont mis en avant 100 000, nombre qui, selon certains, pourrait être largement dépassé. Selon des experts de l'Onu, entre 1 et 1,5 million d'habitants se trouvent dans des situations de très grande vulnérabilité.
Cent mille, c'est presque devenu aujourd'hui dans les pays pauvres une unité de compte pour les victimes des grandes catastrophes - cataclysmes, famines, conflits ou guerres.

La junte en place rechigne à laisser entrer les aides humanitaires : peut-être estime-t-elle que le pays est trop peuplé ? Une idée que pourraient, s'ils ne l'ont déjà eue, reprendre demain pour la planète les dirigeants du monde...

    Vendredi 9 mai 2008

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Popularités en chute

  Le premier a tout fait : bénéficié de manipulations pour être déclaré élu, pris ses distances avec les affres du pouvoir pendant ses premiers mois de présidence, paru hébété après les attentats du 11 septembre, imposé des mesures attentatoires aux libertés, engagé une première guerre sans la mener jusqu'au bout, raconté un tissus de bobards pour engager la seconde et crié victoire trop tôt, défié la communauté internationale sur l'effet de serre, mis en place des procédures de détention et d'inquisition à l'abri du droit et des contrôles... Il a fallu 87 mois pour que le président Bush batte des records d'impopularité, avec 71 % des Américains qui désapprouvent sa conduite des affaires.
  Le second en a bien moins fait : mais il a beaucoup parlé, beaucoup annoncé, beaucoup promis, brassé trop de mots ; il s'est trop exhibé, a trop souri, trop changé, trop déconcerté, trop dérouté, trop déboussolé, trop déçu... En 12 mois, le président Sarkozy a connu une chute de popularité sans précédent, décrochant de plus de 25 points.

   A qui faut-il attribuer la palme de la rapidité ? À Sarkozy ou aux Français ?

    Lundi 5 mai 2008


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Sources du mal

Vu hier Paprika, film d'animation japonais. Une équipe scientifique travaille sur l'observation des rêves et a mis au point un procédé qui permet de les enregistrer, de les capter, d'entrer dans leur monde : un monde qui rejoint ceux de l'imaginaire, du spectacle, du cirque, du cinéma, de la télé et d'internet. Mais, échappant tant aux rêveurs et aux artistes qu'aux savants, les créatures du numérique et de de l'onirique submergent le monde et menacent les sociétés humaines. et l'impassible patron des scientifiques a ce mot: le mal (l'accident, la catastrophe...) vient toujours d'un mélange d'orgueil et de négligence.”

   Difficile de ne pas penser aux différents accidents nucléaires ou chimiques, à l'effet de serre, aux atteintes à la couche d'ozone et au vivant. Sans doute faudrait-il ajouter l'avidité, recherche insatiable du profit, de richesses et de toujours plus de consommations. A la source de nos maux : l'orgueil, l'avidité et la négligence.

    Mercredi 30 avril 2008

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Le trou noir du CERN

  Troublante cette annonce ce matin à la radio.
  Deux physiciens, l'un américain, l'autre espagnol, auraient déposé devant un tribunal d'Honolulu une plainte visant à empêcher la mise en fonctionnement du nouvel accélérateur de particules du Cern. Cette nouvelle et puissante installation doit, entre autre, permettre de reproduire des phénomènes du même type que ceux qui se sont produits lors du Big Bang originel ; et ces deux scientifiques redoutent qu'un incident dégénère et entraîne la formation d'un trou noir susceptible d'avaler la Terre et ses planètes.
  Les amateurs d'humour noir apprécieront : la Terre et l'Humanité aspirés dans ce qui n'est, jusqu'ici, qu'une hypothèse scientifique. Et tous les humains disparaissant dans l'expérience qui aurait validé cette hypothèse...
  Quelques futés ont bien subodoré le poisson d'avril. Mais dès hier, le porte-parole du Cern, James Gillies, s'employait de  Genève à nous rassurer, précisant que «deux études ont déjà démontré que les recherches étaient sûres».

  Ouf !

  Mardi 1er avril 2008


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Retour de Venise 

De retour de Venise, un ami me raconte les splendeurs de ce lieu chargé d'histoire…, mais aussi : les hordes de touristes, place Saint-Marc et sur les principaux itinéraires ; les eaux glauques des canaux, leurs relents fétides et leurs détritus postmodernes ; des restaurants aux menus en dix langues où l'on peut trouver les pires rapports qualité-prix d'Europe.
- “Mais là n'est pas l'essentiel, enchaîne-t-il, La Serenissime est menacée...”
- “Oui, par le pourrissement des fondations et la montée des eaux.”
- “Pas seulement. Il y a plus grave encore : tous les rez-de-chaussée des maisons du centre ont été transformés en boutiques de luxe, demi-luxe, verroterie, souvenirs, masques de carnaval, mode, fripe, etc. ; à l'exception de celle de Cartier - qui respecte la demeure qui lui fait l'honneur de l'héberger - d'interminables suites de vitrines tape-à-l'œ il ont défiguré les façades, dénaturé les rues et transformé le cœur historique de la ville en un vaste hypermarché vulgaire et clinquant, où les touristes déambulent comme des clients dans les allées d'une grande surface ouverte le dimanche, un jour de pluie...“
 

  Sic transit. Les débuts de la marchandisation et de la mondialisation ont fait la fortune et la grandeur de Venise. Aujourd'hui, après deux siècles d'accélérations, marchandisation et mondialisation assurent à la Serenissime une rente de survie, mais au prix de l'essentiel : de son charme et de son âme.

  Lundi 10 mars 2008


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"Casse-toi..."

Hier matin, au Salon de l'agriculture, le président  Nicolas Sarkozy se fraye péniblement son passage dans une cohue d'accompagnateurs et de badauds ; en se faufilant, il serre des mains, se force à sourire et sème sans conviction des “bonjour, “bonjour, “merci hein, “bonjour ; un ‘hououou...” hostile et son visage se tend,  bonjour Monsieur... ; et soudain, c'est l'échange saisi par une caméra, diffusé par Le Parisien, puis par bien d'autres sites :
- une voix grasse : "ah non, touche-moi pas" ;
- le président, à mi-voix et sans aménité : "Casse-toi, alors" ;
- la voix grasse : "Tu me salis" ;
- le président, après un regard en biais, toujours à mi-voix mais plus intensément : "Casse-toi, alors, pauvre con".
  Un proche l'avertit : “On est filmé. Le président tente de remettre en place son sourire en lançant des saluts de la main... 

 Un commentateur rappelle qu'au cours d'un de ses bains de foule, de Gaulle avait été interpellé par un sonore “À mort les cons”. À quoi il répondit, tourné vers l'intervenant : “Vaste programme, Monsieur”. De Gaulle qui avait acquis un surcroît d'estime des Français par son exigence de ne rien payer sur des deniers publics de ses dépenses personnelles ou familiales. De Gaulle, dont Sarkozy a dit, avant-hier aux Invalides, lors de l'inauguration de son Historial : “Le général de Gaulle reste un exemple pour chaque Français".

  Dimanche 24 février 2008



Kokopelli

En lisant L'Humanité : “L'association Kokopelli, distributrice de variétés anciennes non inscrites sur le catalogue officiel (...), vient d'être condamnée à verser 12 000 euros au grainetier Baumaux et 23 000 euros à l'État et à la Fédération des industriels de la semence”. Dans le concert international de déclarations en faveur de la biodiversité et au lendemain du “Grenelle de l'environnement”, cette décision judiciaire française choque et fait désordre : d'autant que, selon l'association, ce jugement s'explique largement par le fait que les autorités françaises n'ont pas mis notre législation en conformité avec les directives européennes visant à la protection de la biodiversité. 

 Une exception française injustifiable et insoutenable. 

Samedi 2 février 2008


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Année la plus chaude

En lisant Le Monde : "Selon les climatologues du Goddart Institute for Space Studies (GISS) de la NASA, 2007 a été la deuxième année la plus chaude dans le monde depuis cent ans", après 1998. 

 Aucun dirigeant d'aujourd'hui, quand il sera jugé pour non-assistance à Planète en danger, ne pourra dire : "Nous ne savions pas". 

Vendredi 25 janvier 2008

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Spatial touristique

 En lisant Le Monde : "Le milliardaire Richard Branson a présenté, hier à New York, son vaisseau spatial touristique, dont les premiers vols sont prévus pour 2010". Sur SpaceShipTwo, le prix du billet sera, pour chacun des huit passagers, de 200 000 dollars. 

 Insondable inégalité de notre monde. Criminelle irresponsabilité qu'il y a à laisser se développer ce type d'activité, gaspilleuse d'énergie, source de multiples pollutions et de dégradations supplémentaires pour notre Terre 

jeudi 24 janvier 2008

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Autour de l'Iran

   Une dépêche d'AP : "Israël a procédé lundi au lancement d'un satellite-espion capable de surveiller le territoire iranien, y compris de nuit et par mauvais temps, ont annoncé des responsables de la défense". 

 Après les menaces réitérées de Bush et l'annonce de la création d'une base militaire française à Abu Dhabi, la pression militaire se durcit autour de l'Iran. Ce n'est qu'ex post que l'on saura si ces mesures et ces gesticulations auront contribué à maintenir la non-guerre ou à déclencher un conflit. 

lundi 21 janvier 2008

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Menaces sur la biodiversité

   En lisant Le Monde : Plus de 10 000 espèces exotiques menacent la biodiversité en Europe. Mais aucune stratégie commune n'a encore été adoptée par l'Union européenne pour lutter contre ce phénomène”. 

 Fascinant ce contraste entre l'extrême facilité avec laquelle les hommes de pouvoir préparent et engagent des guerres depuis des siècles ; et leurs incapacité à construire des réponses aux nouvelles menaces qui croissent et se multiplient depuis quelques décennies. 

jeudi 17 janvier 2008

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Cher Tony Blair

 En lisant Le Monde : "Très cher Tony Blair - L'ancien premier ministre britannique conseillera la banque JP Morgan pour 1 million de dollars par an (El Pais)". 

 Dans notre monde confronté à tant de pauvretés et à des menaces vitales de tous ordres, ce goût des richesses et cette complaisance de dirigeants de pays démocratiques à l'égard des puissances d'argent a quelque chose d'obscène. 

11 janvier 2008

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Une suggestion

 Un ancien étudiant m'écrit : « Je suis tombé un peu par hasard sur votre site, que je trouve très bien fait sur la forme et tout à la fois instructif et stimulant sur le fond. J'aurai néanmoins une suggestion: je trouve que vous n'insistez pas assez sur une partie de votre travail qui me semble aussi importante que le reste, à savoir la direction de thèse - et de façon plus générale vos relations avec vos étudiants. Même si elle est moins visible que la production d'ouvrages et d'articles, elle est toute aussi structurante pour certains de ceux qui ont pu en bénéficier ».

 
 Je lui réponds «Je vais y réfléchir. Comment le faire sans tomber dans l'auto-valorisation ? Et pour la direction de thèse, comment le faire sans répéter ce que j'écris dans l'Art de la thèse ? Parlez-en avec d'autres enseignants : c'est très difficile, quand on enseigne, de savoir ce qu'on apporte, etc. Le plus simple, pour moi serait que d'anciens étudiants m'écrivent en me disant à la fois en quoi je les ai (éventuellement) desservis ou aidés, et en quoi je leur ai été utile. Si vous m'adressez un texte, je pourrais le passer dans "Echos" et si j'en reçois plusieurs, je pourrais ouvrir une rubrique "Souvenirs d'étudiants"». 

2 janvier 2008


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Décembre 2007


Sur la misère

«Messieurs, je le répète en terminant, ce n'est pas seulement à votre générosité que je m'adresse, c'est à votre sagesse, et je vous conjure d'y réfléchir. Messieurs, songez-y, c'est l'anarchie qui ouvre des abîmes, mais c'est la misère qui les creuse. (C'est vrai ! C'est vrai !) Vous avez fait des lois contre l'anarchie, faites maintenant des lois contre la misère ! (Mouvement prolongé sur tous les bancs. - L'orateur descend de la tribune et reçoit les félicitations de ses collègues). » Victor Hugo, « Discours sur la misère », Actes et Paroles I, Assemblée législative 1849-1851,9 juillet 1849.

 
  Mais, dès lors que la misère vient des tréfonds de la société, quel pouvoir prendrait ces lois ? Et, s'il s'en trouvait un, quelle pourrait être leur efficacité ? 

18 décembre 2007


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