Ici
sont reprises des réactions - passées ou non par
“contactez-moi” - à ce site : critiques,
divergences, propositions ou autres contributions. Dans certains cas,
je peux m’autoriser une brève réponse.
Peuvent aussi trouver ici leur place des propos, des prises de
position, des déclarations venus d’ailleurs -
d’autres temps, d’autres lieux, d’autres
horizons - qui me paraissent de nature à nourrir
l’information ou la réflexion sur des
problèmes importants, des réponses, des actions
en cours ou à mener...
Une rubrique qui, elle aussi, se renouvelle au fil des semaines.
Bémols.
Vendredi dernier, à Dublin, les représentants de
111 pays ont adopté un projet de traité interdisant les
bombes à sous-munitions et prévoyant la destruction d'ici
huit ans de ces armes - dont on sait les ravages qu’elles font
dans les populations civiles, notamment parmi les enfants, longtemps
après la fin des conflits. Un bémol : les principaux
fabricants de ces armes - États-Unis, Russie et Chine - n'ont
pas participé à cette négociation.
Le même jour, à Bonn, s’achevait la
conférence des Nations unies sur la biodiversité. Selon
l’économiste indien, Pavan Sukhdev,
“l'appauvrissement biologique coûterait 2 000
milliards par an, soit 6 % du produit brut mondial.
L'urbanisation, la standardisation des pratiques agricoles, la
pollution, la prolifération d'espèces envahissantes
introduites par les échanges commerciaux, le changement
climatique enfin, sont les principales causes du
phénomène”, rapporte le Monde.
Quelques timides avancées ont été
esquissées : un mécanisme de financement pour les aires
protégées, la mise en place d’un groupe
international d’experts de la biodiversité, la
préparation d'un traité international sur l'utilisation
des ressources génétiques, trop souvent encore
pillées par de grandes firmes dans des pays pauvres...
Pendant
ce temps, la biodiversité se réduit (voir billet du 16
mai) - ce qui n’a pas empêché la conférence
de réaffirmer l’objectif fixé à Rio en 1992
de freiner d'ici à 2010 le rythme de disparition des
espèces et des écosystèmes : un vœu
aujourd'hui irréalisable, donc inepte et indigne.
Lundi 2 juin 2008
•••
Publié avant la prochaine convention de l'ONU sur la
biodiversité, une étude réalisée par
la Société zoologique de Londres en collaboration avec le
Fonds mondial pour la nature (WWF) permet d’estimer que la faune
mondiale - poissons, amphibiens, reptiles, oiseaux et mammifères
- a diminué de plus d’un quart (27 %) entre
1970 et 2005. “La pollution, l'agriculture, l'expansion urbaine,
le recours excessif à la pêche et à la chasse, sont
les raisons citées pour expliquer cette tendance”,
rapporte l’AFP qui
précise que “les êtres humains consomment chaque
jour plus de ressources naturelles, et(...) utilisent 25 % de plus
que ce que la nature peut remplacer”.
Il y a 16 ans, au sommet de la Terre de Rio, la biodiversité
avait été retenue, avec le climat et la
désertification, comme une des trois priorités pour notre
planète ; et la Convention des Nations unies sur la
diversité biologique, adoptée lors de cette
conférence fixait comme objectif d’en ralentir la
dégradation dès le début du XXIème
siècle.
Avidité, irresponsabilité, acratie ont balayé les bonnes intentions.
Vendredi 16 mai 2008
•••
Cent mille...
Il y a six jours, le passage du typhon Nargis
s’accompagnait d’une vague de plusieurs mètres qui a
ravagé des dizaines de milliers de km2 dans le sud de la
Birmanie. Les estimations officielles du nombre des victimes sont
passées de quelques centaines à quelques milliers, pour
se fixer vers 23 000 - alors que des informateurs locaux et des
humanitaires ont mis en avant 100 000, nombre qui, selon certains,
pourrait être largement dépassé. Selon des experts
de l’Onu, entre 1 et 1,5 million d’habitants se trouvent
dans des situations de très grande vulnérabilité.
Cent mille, c’est presque devenu aujourd’hui dans
les pays pauvres une unité de compte pour les victimes des
grandes catastrophes - cataclysmes, famines, conflits ou guerres.
La
junte en place rechigne à laisser entrer les aides
humanitaires : peut-être estime-t-elle que le pays est trop
peuplé ? Une idée que pourraient, s’ils ne
l’ont déjà eue, reprendre demain pour la
planète les dirigeants du monde...
Vendredi 9 mai 2008
•••
Le
premier a tout fait : bénéficié de
manipulations pour être déclaré élu, pris
ses distances avec les affres du pouvoir pendant ses premiers mois de
présidence, paru hébété après les
attentats du 11 septembre, imposé des mesures attentatoires aux
libertés, engagé une première guerre sans la mener
jusqu’au bout, raconté un tissus de bobards pour engager
la seconde et crié victoire trop tôt, défié
la communauté internationale sur l’effet de serre, mis en
place des procédures de détention et d’inquisition
à l’abri du droit et des contrôles... Il a fallu 87
mois pour que le président Bush batte des records
d’impopularité, avec 71 % des Américains qui
désapprouvent sa conduite des affaires.
Le second en a bien moins fait : mais il a beaucoup
parlé, beaucoup annoncé, beaucoup promis, brassé
trop de mots ; il s’est trop exhibé, a trop souri,
trop changé, trop déconcerté, trop
dérouté, trop déboussolé, trop
déçu... En 12 mois, le président Sarkozy a connu
une chute de popularité sans précédent,
décrochant de plus de 25 points.
A qui faut-il attribuer la palme de la rapidité ? À Sarkozy ou aux Français ?
Lundi 5 mai 2008
•••
Vu hier Paprika,
film d’animation japonais. Une équipe scientifique
travaille sur l’observation des rêves et a mis au point un
procédé qui permet de les enregistrer, de les capter,
d’entrer dans leur monde : un monde qui rejoint ceux de
l’imaginaire, du spectacle, du cirque, du cinéma, de la
télé et d’internet. Mais, échappant tant aux
rêveurs et aux artistes qu’aux savants, les
créatures du numérique et de de l’onirique
submergent le monde et menacent les sociétés humaines. et
l’impassible patron des scientifiques a ce mot : “le
mal (l’accident, la catastrophe...) vient toujours d’un
mélange d’orgueil et de négligence…”
Difficile
de ne pas penser aux différents accidents nucléaires ou
chimiques, à l’effet de serre, aux atteintes à la
couche d’ozone et au vivant. Sans doute faudrait-il ajouter
l’avidité, recherche insatiable du profit, de richesses et
de toujours plus de consommations. A la source de nos maux :
l’orgueil, l’avidité et la négligence…
Mercredi 30 avril 2008
•••
"Le
vrai crime contre l'humanité serait de rejeter a priori les
biocarburants, et de laisser les pays étranglés par le
manque de produits alimentaires et d'énergie dans la
dépendance et l'insécurité", telle est la
réponse de Luiz Inacio Lula da Silva, président du
Brésil, à Jean Ziegler, rapporteur spécial des
Nations unies pour le droit à l’alimentation, qui a
osé, dans le contexte de la crise alimentaire, associer
“biocarburants” et “crime contre
l’humanité”. C’est que le Brésil
est le deuxième producteur mondial de biocarburants
après les Etats-Unis.
Pourtant
Ziegler avait eu la prudence de ne mettre en cause que les
Etats-Unis (v. mon “billet” du 14 avril). Mais le
monde entier a compris qu’il dénonçait un processus
par lequel l’alimentation des véhicules en agrocarburants
se ferait au détriment de l’alimentation des populations
pauvres de la planète. En outre, au Brésil même,
des mouvements paysans ont commencé à poser ce
problème. Alors Lula a vu rouge.
Jeudi 17 avril 2008
•••
Une dépêche de Reuters :
les 100 courtiers les plus performants du monde ont gagné en
2007 plus de 30 milliards de dollars. La palme revient à John
Paulson dont les gains sont estimés à 3 milliards :
ayant en 2006 jugé probable une crise immobilière aux
Etats-Unis, il a misé sur l'effondrement de produits financiers
adossés aux crédits immobiliers à risque. La crise a fait sa fortune.
Avant-hier,
d’autres dépêches annonçaient que le couple
Clinton avait gagné près de 110 millions de dollars entre
2000 et 2007 ; notamment grâce aux revenus des livres
qu’ils ont publiés (40 millions) et des conférences
que l’ex-président a données (52 millions) : l’art de rentabiliser une présidence glauque.
A l’autre bout, d’innombrables humains survivent, tant mal que pire, avec moins que rien... Les pôles extrêmes du nouvel apartheid mondial.
Lundi 7 avril 2008
•••
En lisant le Monde
: dans les villes africaines, les prix des denrées alimentaires
flambent ; de plus en plus de familles ne peuvent plus suivre, les
esprits s’échauffent, les récriminations
s’aigrissent ; certains se rappellent qu’en octobre
2007 Jacques Diouf, directeur général de la FAO avait
craint qu’un tel phénomène
n’entraîne des “émeutes de la
faim”. Récemment, rappelle Radio Canada,
le Programme alimentaire mondial de l'ONU et l'Agence américaine
pour le développement international ont dû réduire
leurs aides aux populations qui souffrent de la faim en Afrique, Asie
centrale et Amérique latine : leurs stocks sont
insuffisants face à des besoins croissants et, pour les
reconstituer, il leur faudrait compte tenu de la hausse des cours
plusieurs centaines de millions de dollars. “Les prix du
blé, du maïs et du riz, explique Radio Canada,
ont plus que doublé en raison de la demande grandissante de la
part des pays émergents et parce que nombre de produits
agricoles servent aujourd'hui à fabriquer de l'éthanol et
des biocarburants (... donc) à nourrir les automobiles et
camions”.
Des
multitudes touchées par la faim à travers l’anonyme
jeu du marché mondialisé : ni responsables, ni
coupables ?
Vendredi 4 avril 2008
•••
Troublante cette annonce ce matin à la radio.
Deux physiciens, l’un américain, l’autre
espagnol, auraient déposé devant un tribunal
d’Honolulu une plainte visant à empêcher la mise en
fonctionnement du nouvel accélérateur de particules du
Cern. Cette nouvelle et puissante installation doit, entre autre,
permettre de reproduire des phénomènes du même type
que ceux qui se sont produits lors du Big Bang
originel ; et ces deux scientifiques redoutent qu’un
incident dégénère et entraîne la formation
d’un “trou noir” susceptible d’avaler la Terre
et ses planètes.
Les amateurs d’humour noir apprécieront : la
Terre et l’Humanité aspirés dans ce qui
n’est, jusqu’ici, qu’une hypothèse
scientifique. Et tous les humains disparaissant dans
l’expérience qui aurait validé cette
hypothèse...
Quelques futés ont bien subodoré le “poisson
d’avril”. Mais dès hier, le porte-parole du Cern,
James Gillies, s’employait de Genève à nous
rassurer, précisant que «deux études ont
déjà démontré que les recherches
étaient sûres».
Ouf !
Mardi 1er avril 2008
•••
Ce matin, au 7-9 de France-Culture, l’invité traite des États-Unis. Il revient sur le discours de Philadelphie de Barack Obama (voir 22 & 29 III)
et met en relief ce point que je n’avais pas vu dans les articles
et dépêches d’agences dont j’ai alors pris
connaissance : en lien avec la question raciale, Obama a, comme
l’avait fait Martin Luther King, abordé la question
sociale et le problème de la pauvreté. Il a notamment
évoqué la colère de travailleurs pauvres blancs
qui ressentent comme une injustice les avantages - qui leurs sont
refusés - que leurs camarades de travail de couleur tirent de la
discrimination positive. Beaucoup d’entre eux, d’ailleurs,
auraient délaissé la bannière démocrate
pour voter républicain.
Peut-être
les faiseurs d’information n’aiment-ils pas la
complexité et sont-ils rebutés par une double
complexité, raciale et sociale. C’est en tous cas pour moi
une occasion de constater combien il est difficile, dans le
déluge d’informations dont nous bénéficions,
de saisir une réalité - ne serait-ce qu’un discours
- dans toutes ses dimensions.
Lundi 31 mars 2008
•••
Hier,lors d’un entretien avec un journaliste du Washington Times,
la secrétaire d'État américaine Condoleezza Rice a
estimé le discours d’Obama sur les questions raciales (voir 22 III) "important" pour les États-Unis.
Elle a raconté que son propre père, sa
grand-mère et son arrière grand-mère avaient
enduré de "terribles humiliations" pendant leurs enfances dans
le Sud, à l'époque de la ségrégation ;
elle a également reconnu que la question raciale avait
posé de graves difficultés aux États-Unis :
"Mais ce que je voudrais faire comprendre en tant qu'Américaine
noire, a-t-elle ajouté, c'est que les Noirs américains
ont toujours aimé et eu foi en ce pays, même quand ce pays
ne les aimait pas et n'avait pas foi en eux ; et c'est notre
héritage". Un terrible jugement.
Interrogée sur la question de savoir si le pays avait
fait des progrès sur les questions raciales depuis le mouvement
des droits civiques, Rice a répondu avec prudence : "Il
faut travailler dur chaque jour pour que les mots extraordinaires,
émouvants et inspirateurs des textes fondateurs soient une
réalité pour tous les Américains".
A
chaque séjour aux États-Unis, l’ai
éprouvé ce sentiment : que cet exceptionnel creuset
multiracial reste pétri de pulsions et de tensions racistes -
plus ou moins retenues, réprimées, condamnées ou
refoulées... Ce que confirment à mes eux les propos
convergents d’Obama et de Rice.
Samedi 29 mars 2008
•••
Dans
un discours prononcé le 18 mars à Philadelphie pour
contrer le fait que plusieurs chaînes de télévision
diffusaient en boucle les virulents propos de son ancien pasteur, le
révérend Jeremiah Wright Jr, Barack Obama, candidat
démocrate à l’investiture pour la prochaine
élection présidentielle, a porté le fer dans la
plaie : “Le fait est que les remarques qui ont
été faites et les questions qui ont surgi ces
dernières semaines reflètent les complexités de la
question raciale dans notre pays, que nous n’avons jamais
réellement assumée ; c’est un aspect de notre
union que nous devons encore perfectionner (...). Et si nous nous en
détournons maintenant, si nous nous retranchons chacun dans nos
coins, nous ne serons plus en mesure de nous retrouver pour
résoudre les défis comme la santé,
l’éducation ou le besoin de trouver de bons emplois
à chaque Américain”.
Visé personnellement, il a répondu :
“Je ne peux pas plus renier mon ancien révérend que
je ne peux renier la communauté noire (...). Je ne peux pas plus
le renier que je ne peux renier ma grand-mère blanche, une femme
qui m’a élevé, une femme qui s’est
sacrifiée encore et encore pour moi, une femme qui m’aime
autant que n’importe quoi d’autre dans ce monde, mais une
femme qui m’a un jour confié qu’elle avait peur des
hommes noirs qu’elle croisait dans la rue, et qui a émis
plus d’une fois des stéréotypes ethniques qui
m’ont inspiré un mouvement de recul. Ces personnes font
partie de moi. Et elles font partie des États-Unis, ce pays que
j’aime tant”.
Mais il a aussi réinséré la question
raciale dans la campagne : “Nous pouvons diffuser les
sermons du Révérend Wright sur toutes les chaînes,
tous les jours et en parler jusqu’au jour des élections et
faire l’unique sujet de la campagne autour de la question de
savoir si oui ou non les Américains pensent que je crois ou que
je partage ces propos agressifs. Nous pouvons bondir sur un impair
commis par un supporter d’Hillary pour prouver qu’elle joue
la carte de la race, ou nous pouvons conjecturer que les hommes blancs
se rallieront à John McCain le jour des élections
quelques soient ses mesures politiques. Nous pouvons faire cela (...).
Ou bien, en ce moment, dans cette élection, nous pouvons nous
rassembler et dire ‘Non, pas cette fois’. Et cette fois-ci
nous voulons parler des écoles qui s’écroulent, des
enfants asiatiques et des enfants hispaniques, et des enfants
nés Américains. Cette fois nous voulons rejeter le
cynisme qui nous dit que ces enfants ne sont pas capables
d’apprendre, que ces enfants - qui ne font pas aussi bien que
nous - sont le problème des autres (...). Ce sont nos enfants,
et nous ne les laisserons pas tomber derrière
l’économie du vingt-et-unième siècle”.
Curieux
sentiment qu’une nouvelle fois, à l’instar de
Mendès-France, de Gaulle ou Kennedy, un homme politique - demain
peut-être homme d’État - parle vrai; d’une
manière à la fois libre, réfléchie et
responsable
Samedi 22 mars 2008
•••
Le
pétrole “au plus haut” : plus de 110 dollars le
baril. Le dollar au plus bas : près d’1,6 dollar pour
un euro. Selon les moments et les symptômes, les commentaires se
concentrent sur tel ou tel aspect de la crise en cours :
l’irresponsable laxisme avec lequel ont été
émis des crédits immobiliers aux États-Unis,
l’excessive sophistication d’une finance internationale
gérée par ordinateur, les imprudences d’un trader
de la Société Générale, les
décisions de l’Opep, la propagation des risques bancaires,
la pression des fonds internationaux, l’émergence de fonds
étatiques dits “souverains”, telle ou telle
information qui fait chuter ou rebondir les cours de bourse...
Autant de
regards, autant de diagnostics et de mesures ponctuelles. Son
administration ayant pris pendant le week-end quelques mesures pour
faire face à la menace d’une crise de liquidités
bancaire et boursière, le président Bush - éminent
spécialiste de la méthode Coué depuis que Dieu ne
répond plus à ses prières - fait très
fort : “Les Etats-Unis maîtrisent la situation
(…). Nos institutions financières sont fortes (…).
Nos marchés financiers fonctionnent efficacement (…). Si
nécessaire, nous agirons de façon décisive pour
continuer de ramener l'ordre sur les marchés financiers
(…). A long terme, notre économie ira bien". Heureux
celui qui ne cherche ni à voir, ni à comprendre !
Sans doute
ignore-t-il que nous sommes dans une grande crise capitaliste comme le
monde en a subi à la fin du XIX° siècle et dans les
années 1930 : une crise dont nous avons connu les premiers
syndromes dès les années 1970-1980. Une nouvelle fois,
face aux pays capitalistes bien en place, s’affirment des pays
émergents. Une nouvelle révolution technologique et
énergétique est en cours. L’excessive pression des
nouvelles configurations nationales-mondiales du capital pour
élever les profits engendre de nouvelles
précarités, pauvretés et
inégalités : d’où un essoufflement des
pays avancés alors que vont de l’avant les nouveaux pays
émergents. Mais cette crise présente deux
spécificités majeures : un degré de
mondialisation jamais atteint - une mondialisation à laquelle
nul n’échappe désormais ; et la
dévastation de notre planète due aux excès de nos
prélèvements et de nos rejets - qu’il nous faut
réduire drastiquement.
Dans une
pareille crise, nul ne peut dire que “ça ira bien”,
à moyen ou long terme. Des scénarios extrêmes ne
peuvent être écartés : conflits
régionaux ou guerre mondiale, nouveau partage du monde, mise en
place d’un impitoyable apartheid fondé sur
l’exclusion de multitudes de démunis... Dans un tel
contexte, tout ce que nous pouvons raisonnablement faire serait
d’adopter à tous les niveaux - national et mondial, mais
aussi local, régional et continental - des stratégies qui
prennent en compte, dans la mesure du possible, toutes les dimensions
de la crise.
Dans ce cadre, les prochains dirigeants des États-Unis
seraient bien inspirés de réduire les
inégalités sociales; de diminuer les déficits
jumeaux (budgétaire et extérieur) de leur pays ainsi que
son endettement extérieur et de réduire résolument
les émissions de gaz à effet de serre. Car, dans la crise
actuelle, ce sont des sources majeures de déséquilibre
pour le monde entier.
Lundi 17 mars 2008
•••
De retour de Venise, un ami me raconte les splendeurs de ce lieu
chargé d’histoire…, mais aussi : les hordes de
touristes, place Saint-Marc et sur les principaux
itinéraires ; les eaux glauques des canaux, leurs relents
fétides et leurs détritus postmodernes ; des
restaurants aux menus en dix langues où l’on peut trouver
les pires rapports qualité-prix d’Europe…
- “Mais là n’est pas l’essentiel, enchaîne-t-il, La Serenissime est menacée...”
- “Oui, par le pourrissement des fondations et la montée des eaux…”
- “Pas seulement. Il y a plus grave encore : tous les
rez-de-chaussée des maisons du centre ont été
transformés en boutiques de luxe, demi-luxe, verroterie,
souvenirs, masques de carnaval, mode, fripe, etc. ; à
l’exception de celle de Cartier - qui respecte la demeure qui lui
fait l’honneur de l’héberger - d’interminables
suites de vitrines tape-à-l'œil ont défiguré
les façades, dénaturé les rues et
transformé le cœur historique de la ville en un vaste
hypermarché vulgaire et clinquant, où les touristes
déambulent comme des clients dans les allées d’une
grande surface ouverte le dimanche, un jour de pluie...“
Sic
transit… Les débuts de la marchandisation et de la
mondialisation ont fait la fortune et la grandeur de Venise.
Aujourd'hui, après deux siècles
d’accélérations, marchandisation et mondialisation
assurent à la Serenissime une rente de survie, mais au prix de
l’essentiel : de son charme et de son âme.
Lundi 10 mars 2008
•••
Vif
affrontement entre les deux candidats en tête dans les primaires
américaines, le républicain John McCain et le
démocrate Barack Obama.
«Nous avons entendu M. Obama dire qu'après avoir
retiré les forces américaines il se
« réserverait le droit “d'agir” si
Al-Qaida formait une base en Irak ». M. Obama ignore-t-il
qu'Al-Qaida est toujours présente en Irak, que nos militaires la
combattent avec succès tous les jours, et que sa politique de
retrait enhardirait Al-Qaida ?» avait lancé John McCain
hier.
Barack Obama a répondu aujourd’hui : «J'ai
des nouvelles pour (M. McCain) : il n'y avait pas d'Al-Qaida en Irak
avant que George Bush et John McCain nous embarquent dans une guerre
qui n'aurait jamais dû être autorisée ni
livrée. John McCain aime à dire qu'il veut poursuivre
Oussama Ben Laden jusqu'aux portes de l'enfer, mais jusqu'à
présent tout ce qu'il a fait c'est suivre George Bush dans une
guerre en Irak (...) à laquelle j'entends mettre fin pour que
nous puissions réellement poursuivre Al-Qaida en Afghanistan et
dans les montagnes du Pakistan».
Comme
Obama, je pense que la guerre d’Irak “n'aurait jamais
dû être autorisée ni livrée” ;
elle a été lancée sur la base
d’allégations mensongères et de preuves
falsifiées par un président qui n’aurait jamais
dû être proclamé élu.
Jeudi 28 février 2008
•••
Hier
matin, au Salon de l'agriculture, le président Nicolas
Sarkozy se fraye péniblement son passage dans une cohue
d’accompagnateurs et de badauds ; en se faufilant, il serre
des mains, se force à sourire et sème sans conviction des
“bonjour”, “bonjour”, “merci hein”,
“bonjour” ; un ‘hououou...” hostile et son
visage se tend, “bonjour Monsieur...” ; et
soudain, c’est l’échange saisi par une
caméra, diffusé par Le Parisien, puis par bien
d’autres sites :
- une voix grasse : "ah non, touche-moi pas" ;
- le président, à mi-voix et sans aménité : "Casse-toi, alors" ;
- la voix grasse : "Tu me salis" ;
- le
président, après un regard en biais, toujours à
mi-voix mais plus intensément : "Casse-toi, alors, pauvre
con”.
Un proche
l’avertit : “On est filmé”. Le
président tente de remettre en place son sourire en
lançant des saluts de la main...
Un
commentateur rappelle qu’au cours d’un de ses bains de
foule, de Gaulle avait été interpellé par un
sonore “À mort les cons”. À quoi il
répondit, tourné vers l’intervenant :
“Vaste programme, Monsieur”. De Gaulle qui avait acquis un
surcroît d’estime des Français par son exigence de
ne rien payer sur des deniers publics de ses dépenses
personnelles ou familiales. De Gaulle, dont Sarkozy a dit, avant-hier
aux Invalides, lors de l’inauguration de son Historial :
“Le général de Gaulle reste un exemple pour chaque
Français".
Dimanche 24 février 2008
•••
En lisant le Monde : lancement
hier de l'Année internationale de la planète Terre, une
initiative conjointe de l'Union internationale des sciences
géologiques et de l'Unesco. "La
Terre a des ressources limitées, qui sont partagées
aujourd'hui par 6,5 milliards de personnes et le seront en 2020 par 9
milliards, a déclaré le directeur général de l'Unesco devant plus de mille participants. Or,
pour conserver une planète plus sûre, plus saine et plus
pérenne, nous avons besoin de mieux comprendre le
fonctionnement des systèmes complexes de la Terre". Il va
donc s’agir de «mettre les géosciences au service de
l'humanité pour affronter les défis de demain» et
notamment de chercher comment «mieux faire face à une
occupation plus importante des sols, à une demande de ressources
en eau plus forte et aux soubresauts meurtriers de notre planète
: tsunamis, éruptions volcaniques, séismes...».
C’est à se tordre : de rage, de rire ou de désespérance.
La Terre est déséquilibrée, ravagée,
souillée, par l’Humanité certes, mais une
Humanité radicalement inégale - et donc principalement
par les prélèvements et les déchets d’un
cinquième à un tiers des humains.
Plus qu’aux effets, c’est aux sources qu’il faut
s’attaquer. C’est donc sur les dévastations les plus
graves causées par nos gaspillages, nos inconséquences et
notre incessante recherche de toujours plus, que les docteurs en
géosciences doivent travailler en priorité : pour
conduire nos sociétés à en prendre conscience et
à réformer leurs modes de vie.
Mercredi 13 février 2008
•••
En lisant le Monde : “Une
crise alimentaire majeure se profile (...). Pression
démographique, croissance économique,
réchauffement climatique (... et) erreur des politiques
menées jusqu'à présent” en sont les principales causes. La hausse des prix mondiaux, le symptôme macro-économique le plus visible. “A l'aube du XXIe siècle, l'agriculture est donc redevenue un problème majeur pour l'humanité”.
Si
l’on prend en compte la radicale inégalité du
monde, cela va, de plus en plus, être un enjeu vital pour des
milliards d’humains. Déjà des paysanneries
pratiquant des cultures vivrières ont été
déstabilisées ou détruites par des exportations
subventionnées du Nord et par l’emprise sur leurs terres
de grandes cultures modernes. Et maintenant, la demande de
biocarburants pour des automobilistes des deux
hémisphères entre en concurrence avec les alimentations
de base de populations démunies. A quoi s’ajoutent le
changement climatique, les sécheresses, les avancées de
déserts et les pénuries d’eau
annoncées.
Vendredi 8 février 2008
•••
En lisant L’Humanité : “L’association
Kokopelli, distributrice de variétés anciennes non
inscrites sur le catalogue officiel (...), vient d’être
condamnée à verser 12 000 euros au grainetier
Baumaux et 23 000 euros à l’État et à
la Fédération des industriels de la semence”.
Dans le concert international de déclarations en faveur de la
biodiversité et au lendemain du “Grenelle de
l’environnement”, cette décision judiciaire
française choque et fait désordre : d’autant
que, selon l’association, ce jugement s’explique largement
par le fait que les autorités françaises n’ont pas
mis notre législation en conformité avec les directives
européennes visant à la protection de la
biodiversité.
Une exception française injustifiable et insoutenable.
Samedi 2 février 2008
•••
“Les
principaux pays émetteurs de gaz à effet de serre (GES),
réunis cette semaine à Hawaï, ont salué le
changement positif d'attitude des États-Unis, tout en appelant
Washington à franchir une nouvelle étape en fixant des
objectifs chiffrés de réduction de ses
émissions”, annonce une dépêche de Reuters.
Quatre remarques :
1°/ Les travaux se sont déroulés à huis clos.
2°/ Il n’est pas dans les usages de dire ses quatre
vérités à la personne ou la puissance invitante.
3°/ Depuis sept ans, le président Bush s’est
montré maître dans l’art de tergiverser et
d’embobeliner ses partenaires.
4°/ Quoi qu’ait pu dire ou avancer James Connaughton,
président du Conseil de la Maison Blanche sur la qualité
environnementale, on peut être sûr que Bush restera
jusqu’au terme de son mandat hostile à la fixation, pour
les États-Unis d’Amérique, d’objectifs
chiffrés de réduction des émissions de GES.
Une autre agence de presse aurait tout aussi bien pu
écrire : “Les 200 pays non invités à
Hawaï, plus quelques autres, déplorent que le principal
pays émetteur de GES, non content d’avoir refusé le
protocole de Kyoto, est en train de faire perdre une année
à la communauté internationale dans la préparation
de l’après-Kyoto. Ce qui se paiera en dégradations,
en désordres climatiques et en difficultés
supplémentaires”.
Les glaces polaires s’amenuisent, les mangroves et les
coraux sont en grand danger, une large part de la Chine est
paralysée par une vague de froid et de neige exceptionnelle.
Mais ExxonMobil vient d’annoncer avoir fait en 2007 le
bénéfice record de 40,6 milliards de dollars.
- Merci !
- Merci qui ?
Vendredi 1er février 2008
•••
En lisant Le Monde :
"Selon les climatologues du Goddart Institute for Space Studies (GISS)
de la NASA, 2007 a été la deuxième année la
plus chaude dans le monde depuis cent ans", après 1998.
Aucun
dirigeant d'aujourd'hui, quand il sera jugé pour non-assistance
à Planète en danger, ne pourra dire : "Nous ne
savions pas".
Vendredi 25 janvier 2008
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En lisant Le Monde :
"Le milliardaire Richard Branson a présenté, hier
à New York, son vaisseau spatial touristique, dont les premiers
vols sont prévus pour 2010". Sur SpaceShipTwo, le prix du billet
sera, pour chacun des huit passagers, de 200 000 dollars.
Insondable
inégalité de notre monde. Criminelle
irresponsabilité qu'il y a à laisser se développer
ce type d'activité, gaspilleuse d'énergie, source de
multiples pollutions et de dégradations supplémentaires
pour notre Terre
jeudi 24 janvier 2008
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Une dépêche d'AP :
"Israël a procédé lundi au lancement d'un
satellite-espion capable de surveiller le territoire iranien, y compris
de nuit et par mauvais temps, ont annoncé des responsables de la
défense".
Après
les menaces réitérées de Bush et l'annonce de la
création d'une base militaire française à Abu
Dhabi, la pression militaire se durcit autour de l'Iran. Ce n'est qu'ex
post que l'on saura si ces mesures et ces gesticulations auront
contribué à maintenir la non-guerre ou à
déclencher un conflit.
lundi 21 janvier 2008
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En lisant Le Monde :
“Plus de 10 000 espèces exotiques menacent la
biodiversité” en Europe. Mais aucune stratégie
commune n'a encore été adoptée par l'Union
européenne pour lutter contre ce
phénomène”.
Fascinant
ce contraste entre l’extrême facilité avec laquelle
les hommes de pouvoir préparent et engagent des guerres depuis
des siècles ; et leurs incapacité à
construire des réponses aux nouvelles menaces qui croissent et
se multiplient depuis quelques décennies.
jeudi 17 janvier 2008
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Chaque samedi matin à 7h05 sur France Culture,
Ruth Stégassy aborde dans son émission "Terre à
terre" un problème touchant à l'environnement, donc
à notre mode de développement et à nos relations
avec la Terre et le Vivant. Ce matin, le sujet était l'eau et
l'invité Marc Laimé. Quelques notations prises au vol...
Le réseau de distribution d'eau français a
été installé en sept ou huit
générations ; le coût cumulé de
l'installation est colossal et, aujourd'hui, aucun pays pauvre ne
pourrait, sur quelques décennies, en assumer la charge pour ses
propres habitants. D'autant moins que, pour ces pays comme pour bien
d'autres, les dépenses d'armement l'emportent de très
loin sur celles consacrées aux équipements sociaux.
Les nouvelles technologies ? Elles ont aussi leurs
coûts : énergétiques, écologiques et
financiers. Ainsi, le dessalement de l'eau de mer implique un
investissement, nécessite beaucoup d'énergie et
entraîne le rejet d'un litre de saumure pour un litre d'eau douce
produite. Quant à la production d'eau potable des grandes
agglomérations à partir de la ressource qu'offrent leurs
propres eaux usées, elle implique des installations
extrêmement sophistiquées et très
coûteuses : seulement trois villes ont à ce jour
commencé à s'en équiper, Singapour, la capitale de
la Namibie et une ville d"Australie.
Ainsi, de
même que la production de certains biocarburants nécessite
de l'eau, de même, la production d'eau dessalée
nécessite de l'énergie : la réponse à
une pénurie bute sur une autre. Plus largement, si nous
privilégions les réponses techno-industrielles en
laissant perdurer les inégalités actuelles,
l'accès à l'eau pour usage alimentaire et sanitaire va,
au cours des prochaines décennies, encore se
détériorer pour des masses croissantes de
démunis.
12 janvier 2008
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En lisant Le Monde :
"Très cher Tony Blair - L'ancien premier ministre britannique
conseillera la banque JP Morgan pour 1 million de dollars par an (El Pais)".
Dans
notre monde confronté à tant de pauvretés et
à des menaces vitales de tous ordres, ce goût des
richesses et cette complaisance de dirigeants de pays
démocratiques à l'égard des puissances d'argent a
quelque chose d'obscène.
11 janvier 2008
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Un ancien étudiant m'écrit :
«… Je suis tombé un peu par hasard sur votre site,
que je trouve très bien fait sur la forme et tout à la
fois instructif et stimulant sur le fond. J'aurai néanmoins une
suggestion: je trouve que vous n'insistez pas assez sur une partie de
votre travail qui me semble aussi importante que le reste, à
savoir la direction de thèse - et de façon plus
générale vos relations avec vos étudiants.
Même si elle est moins visible que la production d'ouvrages et
d'articles, elle est toute aussi structurante pour certains de ceux qui
ont pu en bénéficier …».
Je lui
réponds «…Je vais y réfléchir.
Comment le faire sans tomber dans l'auto-valorisation ? Et pour la
direction de thèse, comment le faire sans répéter
ce que j'écris dans l'Art de la thèse ? Parlez-en avec
d'autres enseignants : c'est très difficile, quand on enseigne,
de savoir ce qu'on apporte, etc. Le plus simple, pour moi serait que
d'anciens étudiants m'écrivent en me disant à la
fois en quoi je les ai (éventuellement) desservis ou
aidés, et en quoi je leur ai été utile. Si vous
m'adressez un texte, je pourrais le passer dans "Echos" et si j'en
reçois plusieurs, je pourrais ouvrir une rubrique "Souvenirs
d'étudiants"…».
2 janvier 2008
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(...)
«Messieurs, je le répète
en terminant, ce n'est pas seulement à votre
générosité que je m'adresse, c'est à votre
sagesse, et je vous conjure d'y réfléchir. Messieurs,
songez-y, c'est l'anarchie qui ouvre des abîmes, mais c'est la
misère qui les creuse. (C'est vrai ! C'est vrai !) Vous avez
fait des lois contre l'anarchie, faites maintenant des lois contre la
misère ! (Mouvement prolongé sur tous les bancs. -
L'orateur descend de la tribune et reçoit les
félicitations de ses collègues). » Victor Hugo,
« Discours sur la misère », Actes et Paroles I,
Assemblée législative 1849-1851,
9 juillet 1849.
Mais,
dès lors que la misère vient des tréfonds de la
société, quel pouvoir prendrait ces lois ? Et, s’il
s’en trouvait un, quelle pourrait être leur efficacité
?
18 décembre 2007
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